
Les visites
en CHSLD
Mouvement de passage est une pratique artistique qui souhaite réenchanter les milieux de soins en installant la proposition chorégraphique et musicale à même le CHSLD. Elle offre un contact privilégié et sensible avec la créativité des résident·es, pour les amener à redécouvrir et réhabiter leur quotidien. Lors d’une visite Mouvement de passage, des artistes de la danse et un·e musicien·ne se déplacent dans les corridors, les chambres et les salles communes afin d’aller à la rencontre des résident·es qui y habitent, plus particulièrement les personnes qui sont en perte d’autonomie ou en fin de vie, pour qui la participation aux activités régulières de l’établissement devient plus difficile.
Les artistes et les résident·es entrent en relation par le mouvement, la danse, le toucher, la musique, le chant, la présence et le jeu. Selon la personne, ce peut être une toute petite danse avec les yeux ou les mains, ou une proposition chorégraphique plus élaborée. Nous créons à chaque visite une danse de l’instant à l’écoute des résident·es. Les artistes s’adaptent entièrement à l’univers de ces dernier.es pour improviser à partir de leur état présent, afin de faire émerger tout un potentiel d’expression. Ils créent à partir du microcosme qu’est le CHSLD: les allées et venues du personnel soignant, la présence de la famille, les bruits, les odeurs, l’état cognitif de la personne résident.e, son humeur. Les pleurs, les cris, tout comme les rires, font partie de l’expérience. Cela demande une présence active, engagée et bienveillante.
En duo avec un·e artiste en danse et un·e musicien·ne OU en trio avec deux artistes en danse et un·e musicien·ne. Les artistes évoluent de façon autonome et une visite Mouvement de passage ne requiert pas la présence en continue d’un membre du personnel du CHSLD. En moyenne, une quarantaine de résident·es sont rejoint·es par visite. Ce nombre peut varier, car la qualité des rencontres a préséance sur la quantité.
Durée de la visite : 1 h 30
Témoignages
*
Témoignages *
Ce sont de beaux moments d’échange qui fracassent des bulles et stimulent les sens. C’est vraiment un plus dans notre milieu de vie! Les interactions sont super, l’approche est magnifique, toute en délicatesse !
Sadjia, technicienne en loisirs au CHSLD Paul-Gouin
J’ai été émerveillé la première fois que j’ai assisté à une visite Mouvement de passage. J’ai été très heureux de constater que c’étaient des interventions qui étaient individualisées pour chaque résident·e. Lors d’une récente visite, une artiste a passé 20 minutes avec une dame, la dame dansait sur sa chaise, c'était merveilleux, j'étais ému.
Joël, récréologue au CHLSD La Pinière
Ça égaie le cœur des résident·es. Les mouvements, les sons, ils regardent, ils écoutent, ça leur donne de la joie.
Olive, technicienne en loisirs
au CHSLD Benjamin-Victor-Rousselot
Ça fait 18 ans que je suis préposée aux bénéficiaires, et je pense que Mouvement de passage est l’activité que j’ai trouvé la plus touchante! Il faudrait qu’il y en ait partout! Ça résonne dans le corps, celui des résident.es et le mien. Une des résidentes pleurait tellement elle trouvait ça beau!
Josée, préposée aux bénéficiaires au CHSLD Val-des-Brises
Il y a des rencontres professionnelles qui marquent une carrière, et d’autres qui marquent le cœur. Mon expérience avec Mouvement de Passage appartient à cette deuxième catégorie. Comment décrire cela avec des mots ? C’est comme une dose d’amour concentrée, transmise directement aux résident·es. Chaque artiste prend le temps de se rapprocher, d’observer, jusqu’à trouver une manière d’entrer en contact, même avec des personnes avec qui cela semble impossible. J’ai vu des personnes qui semblaient coupées du monde, se mettre à rire, taper des mains, esquisser des pas de danse, et même chanter. C’est comme si, le temps d’un instant, les murs invisibles qui les entourent tombaient. Il s’agit d’une expérience unique, qui touche les résident·es droit au cœur et leur laisse le sourire aux lèvres longtemps après leur départ. Un immense merci pour ces instants d’humanité pure. Ce sont des initiatives comme celle-là qui, à force d’un sourire à la fois, changent véritablement le monde.
Sébastien, technicienne en loisirs
au CHSLD Pierre-Joseph-Triest
Retombées sur les communautés
Les visites offrent la possibilité aux résidente·s, pour qui la participation aux activités régulières dans leur milieu de soins devient plus difficile, de rompre avec la solitude et l’isolement.
Au cours des visites dansées, les artistes et le personnel soignant sont témoins d’un apaisement de l’anxiété, d’un accroissement de la réminiscence mnésique, de moments de lucidité, de sorties d’états de redondance, d’une régulation des émotions, d’une ouverture dans la posture, et de nombreux éclats de rire chez les résident·es.
Les artistes qui participent aux visites dansées bénéficient également de ces rencontres intergénérationnelles. Ces personnes bonifient leur pratique en danse et en musique et ramènent ce savoir dans leur communauté.
Une étude de l’Université McGill a démontré que la récurrence des visites permettait aux personnes vivant avec des troubles neurocognitifs d’augmenter leur capacité à communiquer et de créer des liens non-verbaux significatifs avec leurs pairs à l’aide du mouvement.
Les visites dansées peuvent enrichir la dynamique entre les résident·es et le personnel soignant, et participer à la mise en place de milieux de soins créatifs et dynamiques pour tous. À la suite d’une visite, les gestes fonctionnels - le dîner, le bain, la médication - prennent une autre couleur.
Les proches des résident·es qui assistent aux visites dansées s’inspirent de l’approche non verbale des artistes de Mouvement de passage pour varier et bonifier leurs manières d’entrer en connexion avec leurs personnes aimées vivant avec des pertes cognitives.

*
quelques moments humains d'exception
*
* quelques moments humains d'exception *
Après avoir salué le personnel qui les accueille amicalement, le trio d’artistes se réunit dans un local, se change, élabore la stratégie de déambulation du jour, s’étire, respire profondément, se concentre. Et c’est parti. Tout en déambulant dans l’espace en une lente chorégraphie, les artistes invitent quiconque croise leur chemin à se joindre aux mouvements. La première intervention débute dans la salle commune, ce qui est exceptionnel. En général, les visites commencent dans les chambres, mais on constate que celles-ci sont vides et que la plupart des résident·es se trouvent dans la grande salle à cause de la chaleur. Dans cette grande salle, il y a des hommes et des femmes en fauteuils roulants et d’autres sur de simples canapés. Des personnes atteintes d’alzheimer, de démence ou de troubles cognitifs importants. On en voit qui somnolent.
La musicienne Marie Vallée pénètre dans la salle en jouant du tambour et du kalimba, accompagnée de Georges-Nicolas et de Laurie-Anne. Ils esquissent en souriant quelques mouvements souples de danse devant les résident·es intéressé·es, amusé·es, indifférent·es ou absent·es. Je suis profondément émue, souvent bouleversée, par la complicité et la joie que suscitent ces chorégraphies inattendues avec ces êtres vulnérables, ces duos si intimes aux formes les plus diverses. De petits et grands miracles se produisent sous mes yeux.
À la fin de la visite, dans le même petit local qu’à l’arrivée, le groupe revêt ses habits de tous les jours en discutant de ce qui vient d’être vécu. Les artistes échangent réflexions et impressions sur leur récolte de moments humains d’exception, moments graves, magiques, bouleversants, drôles, reçus comme des cadeaux. Bonheurs partagés avec leurs partenaires du jour. On sent leur reconnaissance pour ces rencontres touchantes, qui viennent les nourrir de l’intérieur.
Manon Barbeau, observatrice, scénariste et réalisatrice






















L’expertise
de l’équipe
Titulaire d’une maîtrise en danse de l’Université du Québec à Montréal portant sur la création en milieu de soins, la fondatrice Ariane Boulet a guidé des centaines de visites dansées dans cinq régions du Québec, formant des dizaines d’artistes à sa démarche fondée sur l'écoute, le respect et une approche relationnelle non verbale. Elle offre des conférences et des ateliers au personnel soignant pour lui proposer - ainsi qu’aux familles et ami·es - de nouvelles façons d'être en lien avec les résident·es de CHSLD. Ariane Boulet est également formée aux cycles supérieurs de l’Université de Montréal comme intervenante en soins spirituels laïques et en accompagnement du deuil et de la fin de vie (DESS en spiritualité et santé).
L’ensemble des artistes qui collaborent au projet de Mouvement de passage et aux ateliers de médiation sont des professionnel·les formé·es en arts vivants. Iels ont oeuvré sur les scènes de la danse et de la musique au Québec – notamment avec des compagnies de renom telles Marie Chouinard, Bouge de là, Margie Gillis – et à l’international. Depuis la création de Mouvement de passage en 2014, ces artistes ont peaufiné leur approche créative et relationnelle pour créer un lien signifiant avec les résident·es de CHSLD, dans une perspective éthique de la vulnérabilité.
Photos | Emily Gan

Une femme souriante aide une personne âgée dans un centre de soins ou une maison de retraite, elles se tiennent la main et échangent un regard chaleureux.